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ACTUALITé
20/10/2015
La contrainte pénale : copier coller du sursis mise à l'épreuve ?

La contrainte pénale est une nouvelle peine qui a été instituée par la loi du 15 aout 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales. Celle-ci a été prise suite aux recommandations issues de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive.

La contrainte pénale oblige le condamné à se soumettre, sous le contrôle du juge de l'application des peines, pendant une durée comprise entre 6 mois et 5 ans – cette période étant fixée par la juridiction – à des mesures de contrôle et d'assistance ainsi qu'à des obligations et interdictions particulières, destinées à prévenir la récidive en favorisant son insertion ou sa réinsertion au sein de la société.

Tout comme le sursis avec mise à l'épreuve, le condamné est soumis aux mesures de contrôle de l'article 132-44 du Code pénal. Notamment, informer préalablement le juge de l'application des peines de tout déplacement à l'étranger. Ou encore, répondre aux convocations du juge de l'application des peines ou du travailleur social désigné.

Pourront  également être imposés les obligations et interdictions de l'article 132-45 du Code pénal, les mesures d'aide de l'article 132-46, le travail d'intérêt général ou encore l'injonction de soins.

Cependant, cette peine est soumise à certaines conditions. Tout d'abord, bien que cette condition sera supprimée au 1er janvier 2017, il faut qu'il ait été commis un délit puni d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans. Par ailleurs, il faut que les faits, la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l'auteur justifient cet accompagnement socio-éducatif individualisé et soutenu.

Cette dernière condition permettra à l'avenir de différencier le sursis avec mise à l'épreuve de la contrainte pénale. Le sursis avec mise à l'épreuve ne deviendra alors qu'une mesure de substitution, lorsque la contrainte pénale ne s'appliquerait pas.

Il faut noter que la situation du condamné est réévaluée au moins une fois par an pour modifier, voir supprimer la contrainte pénale. En outre, en cas d'inobservation de la contrainte pénale, le juge peut, après un rappel du contenu de cette peine, demander la mise à exécution totale ou partielle de la peine d'emprisonnement en principe encourue.

Il est également important de préciser, que la contrainte pénale est une mesure plus douce que l'emprisonnement. C'est alors que la Cour de cassation, dans deux arrêts de la chambre criminelle du 14 avril 2015 n°15-80.858 et 14-84.473, a décidé que cette sanction était d'application immédiate, et ce même pour les infractions commises avant l'entrée en vigueur de la loi promulguant cette sanction.

Finalement, cette mesure phare de la réforme pénale de Christiane Taubira, censée simplifiée les sanctions en droit pénal français, vient s'ajouter à toutes les autres mesures dont le sursis mise à l'épreuve, dont on peine à voir la différence avec celle que l'on pourrait qualifier de petite soeur du sursis avec mise à l'épreuve tant elles se ressemblent.

Censée lutter contre la surpopulation carcérale tout comme le sursis avec mise à l'épreuve, il nous est aisé de se poser la question de son utilité. Bien entendu, il s'agit d'une mesure visant la réinsertion des détenus. Bien entendu, le but est louable.

Toutefois, tenant compte du fait que d'une part, l'arsenal de mesures pénales se proposant au juge étant extrêmement important et que d'autre part, le sursis avec mise à l'épreuve instauré par la loi du 17 juillet 1970, regroupe quasiment intégralement les mêmes obligations et interdictions que la contrainte pénale, la question se pose de savoir si on en avait vraiment besoin.

D'ailleurs, les chiffres vont en ce sens. Alors que l'étude d'impact annexée au projet de loi prévoyait la prononciation entre 8 000 et 20 000 contraintes pénales par an, la réalité en est tout autre. Ce ne sont seulement que 90 contraintes pénales par mois prononcées par les magistrats en moyenne. Au 15 septembre 2015, 900 contraintes pénales étaient comptabilisées par la Direction des affaires criminelles et des grâces.

Selon les magistrats, la raison est simple : Une mesure impliquant un suivi constant par du personnel et des psychologues de ces personnes soumises à la contrainte pénale, sans augmentation réciproques de ces moyens et du personnel pour appliquer cette mesure, ne peut qu'aboutir à un échec de la contrainte pénale. Cela, à raison d'un suivi inadéquat et d'autant plus à raison de l'existence des procédures d'urgence en croissance. Par conséquent, sans aménagement, cette mesure ne pourra que péricliter.