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ACTUALITé
19/10/2015
Le casier judiciaire : droit à l'oubli ?

 

  • Qu’est ce que le casier judiciaire ?

 

Le casier judiciaire est un fichier informatisé dans lequel sont inscrites, essentiellement, les condamnations pénales prononcées par les autorités judiciaires.

 

Cette biographie judiciaire de l’individu a donc pour objet de mémoriser les décisions de justice, d’en gérer l’oubli et de restituer ces informations dans les conditions prévues par la loi.

A cet égard, celui-ci est tenu sous l’autorité du ministre de la Justice, en application de l’article 768 du Code de procédure pénale.

  • Quelles sont les informations contenues dans le casier judiciaire ?

En premier lieu, les informations enregistrées au casier judiciaire des personnes physiques concernent les condamnations initiales.

Plus précisément, les condamnations initiales comprennent les décisions prononcées par les juridictions pénales, telles que la Cour d’assise ou encore les tribunaux correctionnels, mais aussi certaines décisions prononcées par les tribunaux de commerce, tels que les décisions de liquidation judiciaire, et pour finir, certaines décisions administratives et disciplinaires s’agissant des incapacités.

En second lieu, et en vertu de l’article 769 alinéa 1 du Code de procédure pénale, les événements affectant l’exécution des peines après leur prononcé doivent être mentionnés au casier judiciaire.

Cela peut être notamment les décisions concernant les grâces, les réductions de peine, les dispenses de révocation de sursis simple etc.

  • L’accès protégé au casier judiciaire

L’utilité essentielle du casier judiciaire est de pouvoir donner les informations relatives à des décisions judiciaires et intéressant la vie des personnes. Ces informations ne sauraient être délivrées sans que le législateur ait mis en place des verrouillages concernant leur accès.

Sous la forme de bulletins n°1, 2 et 3 ; l’accès à la mémoire du casier judiciaire bénéficie d’une triple protection par son contenu, par la qualité des requérants autorisés et par la procédure de délivrance.

D’une part, la protection par le contenu se justifie à raison d’une vérification d’identité commune et préalable. En effet, l’établissement de chaque bulletin du casier judiciaire nécessite la vérification de l’identité et la recherche des antécédents de l’intéressé.

D’autre part, la protection par la délivrance se justifie et ce, en fonction du bulletin concernés.

Plus précisément, le bulletin n°1 – qui est le relevé intégral des fiches du casier judiciaire applicable à la même personne – ne peut être délivré qu’aux autorités judiciaires. Seul un magistrat de l’ordre judiciaire peut donc en faire la demande et uniquement à l’occasion de ses fonctions judiciaires.

S’agissant du bulletin n°2 – qui contrairement au bulletin n°1, n’est pas un relevé intégrales des fiches du casier judiciaire à raison de l’exclusion de certaines décisions de justice – peut lui, être délivré aux personnes et autorités administratives limitativement énumérées et pour certains motifs seulement (Prévu par l’article 774 alinéa 2 du Code de procédure pénale). A titre d’exemple, les administrations publiques de l’Etat en vue de poursuites disciplinaires peuvent demander la délivrance du bulletin n°2 du casier judiciaire. Ou encore, les autorités militaires saisies de demandes d’intégration dans l’armée.

Pour finir, le bulletin n°3  qui est un contenu expurgé c’est-à-dire qu’il ne contient notamment, que les condamnations, pour un crime ou un délit, à des peines privatives de liberté supérieures à 2 ans qui ne sont assorties d’aucun sursis ou suivant la révocation d’un sursis ; ou encore les condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées sans sursis. A raison de son contenu expurgé, ce bulletin peut être demandé par la personne qu’il concerne ou par le représentant légal d’une personne mineur ou incapable majeur.

  •  L’effacement ou la non inscription au Bulletin numéro 2 du Casier Judiciaire

La non inscription ( ou effacement) du Bulletin numéro 2 du Casier Judiciaire peut être demandé lors du passage en audience correctionnel, notamment par l’intermédiaire de l’avocat qui présentera au Tribunal les pièces justifiant une telle demande.

Si cela n’a pas été fait le jour de l’audience, l’avocat peut déposer une requête comportant un dossier complet auprès du Tribunal ayant prononcé la dernière condamnation. Il est en effet possible de solliciter l’effacement de plusieurs condamnations figurant sur le bulletin numéro 2.

  • L’utilisation du casier : la mémoire du passé, et bientôt celle de l’avenir ?

Un rapprochement récent entre les ministères de l’éducation et de la justice a conduit à l’élaboration d’un décret – actuellement en cours d’examen  au Conseil d’Etat – afin de mettre en place un contrôle des 900.000 fonctionnaires en contact avec des mineurs.

Alors que le casier judiciaire des fonctionnaires publics n’est, aujourd’hui, vérifié qu’à l’heure de l’embauche et à l’aube d’une sanction disciplinaire ; ce décret crée un recoupement – jusqu’alors inexistant – des fichiers entre la justice et l’Education nationale.

En réponse aux récents scandales pédophiles touchant au milieu enseignant, cette nouvelle coordination aura pour objectif de prévenir de nouvelles affaires de pédophilie à l’école.

En effet, ce décret permettra l’identification des fonctionnaires – via le casier judiciaire – qui aurait été par le passé condamnés pour des faits graves et ce, sans que l’administration en ait été informée.

En dépit des éventuels scandales futurs, à raison de cette nouvelle utilisation du casier judiciaire, la rue de Grenelle et la place Vendôme prône le privilège de la transparence… Mais à quel prix ?

  • « L’action en commun » : Vers un casier judiciaire au niveau européen ?

Aujourd’hui, et à raison de l’affirmation d’une coopération interétatique grandissante en matière pénale, certaines situations permettent la délivrance du casier judiciaire national français à des autorités étrangères et vice-versa.

En effet, à titre d’exemple, dans le cadre de l’entraide systématique, le casier judiciaire français peut être informé des condamnations à l’étranger contre un de nos ressortissants.

Toutefois, cette information  ne sera retranscrite que s’il s’agit d’infractions « graves » et ce, que sur le bulletin n°1. Dans ce cadre, la condamnation pénale n’a pas d’effet incapacitant. Cela met évidemment à mal l’effectivité des mécanismes d’entraide répressive.

A l’inverse, lorsqu’il s’agit d’une condamnation française à l’encontre d’une personne étrangère, des limites subsistent.

En effet, à l’instar d’une information systématique des condamnations à l’Etat dont le condamné est le ressortissant, celle-ci ne concerne que les Etats auxquels la France est liée par conventions.

De plus, cette information d’une condamnation exclue celles pour contraventions, les condamnations contre les mineurs et celles par défaut.

Ces différentes fragilités avérées au niveau international ont permis d’assister il y a peu, à une évolution considérable s’agissant du renforcement de la coopération policière et judiciaire au niveau de l’Union européenne.

D’ailleurs, la construction d’un espace judiciaire européen est à l’ordre du jour et se pose alors la question de l’élaboration d’un casier judiciaire au niveau européen.

L’idée est tout à fait louable. Prônée « l’action en commun » par la coopération permettrait a fortiori, une réelle effectivité des mécanismes d’entraide répressive.

Néanmoins, l’éventuelle création d’un casier judiciaire européen se heurte à la diversité des pratiques. Notamment, à titre d’exemple, en Belgique, le bulletin n°3 est remplacé par un certificat de bonne conduite.