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ACTUALITé
30/10/2015
La prostitution est-elle toujours le plus vieux métier du monde ?

Qu’en est-il aujourd’hui du cadre prostitutionnel ?

Chercher les origines historiques de la prostitution est une opération quasiment impossible compte tenu de l’ancienneté de cette pratique. Considéré comme le plus vieux métier du monde, la prostitution n’a pourtant jamais fait l’objet d’une définition légale.

Elle a été notamment définie – de manière jurisprudentielle – par la Cour de cassation en 1912 comme « le fait d’employer son corps, moyennant rémunération, à la satisfaction des plaisirs du public, quelle que soit la nature des actes de lubricité accomplis » (Cass.crim 19 novembre 1912).

Le droit positif quant à lui retient une définition selon laquelle une prostituée est « une femme qui se donne publiquement, pour de l’argent et non pour le plaisir ».

La prostitution n’est donc aujourd’hui pas une infraction pénale. En effet, considérée comme un comportement déviant mais non délinquant, la pratique de la prostitution s’apparente aujourd’hui à l’usage d’une liberté privée. A ce titre, elle relève de la morale et non pas du droit.

Par contre, la réprobation sociale s’abat sur ceux qui la favorisent. En effet, divers prolongements de cette pratique sont susceptibles d’être réprimés par le Code pénal.

C’est le cas notamment du proxénétisme, défini par l’article 225-5 du Code pénal comme le fait, pour quiconque, d’aider, d’assister ou de protéger la prostitution d’autrui ; d’en tirer profit ; d’embaucher une personne en vue de la prostitution.

C’est le cas également du racolage, défini par l’article 225-10-1 du Code pénal comme « le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d’autrui en vue de l’inciter à des relations sexuelles en échanges d’une rémunération ou d’une promesse de rémunération ».

Auteur de l’ouvrage La prostitution dans la ville de Paris, en 1357, Parent-Duchatelet a posé cette question, qui semble de toute évidence, encore d’actualité : « A défaut de pouvoir éradiquer une pratique commune, ne doit-on pas chercher à en limiter les effets ? ».

La proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel semble effectivement empreinte à cette volonté de limiter la pratique de la prostitution, en encadrant et réprimant fermement – une énième fois – ses démembrements ; mais également en prônant une politique de prévention.

Déposée à l’Assemblée nationale le 10 octobre 2013 par Bruno Le Roux – et sortant tout juste du processus de navette parlementaire – cette proposition a pour objet de mettre en place un nouveau dispositif contre la prostitution.

En effet, à défaut de renforcer le cadre juridique permettant la répression des infractions périphériques à la prostitution, ce projet de la loi est dans une optique de prévention des pratiques prostitutionnelles et ce, par des mesures de sensibilisation et d’éducation.

Egalement, le projet de loi crée une contravention – d’un montant de 1.500 euros – sanctionnant les clients. L’objectif ici est en aval et ce, en responsabilisant les clients qui, par leurs agissements, entretiennent la pérennité du système professionnel.

Sans jamais véritablement la nommer, la prostitution fait l’objet d’un encadrement juridique et permet de se poser la question de savoir pour quelles raisons on tente systématiquement d’encadrer la prostitution plutôt que de la réprimer ?

La réponse se trouve être dans l’article 92 du Code général des impôts qui qualifient la prostitution de profession. Dans ce cadre, le fait d’être prostituée est imposable.

L’Etat ne deviendrait-t’il pas alors lui-même proxénète ? Fort heureusement pour ce dernier, l’article 121-2 du Code pénal exclu explicitement toute responsabilité de l’Etat au titre de la responsabilité pénale des personnes morales.

Egalement, d’après le rapport du Senat en 2000, le proxénète est fiscalement soumis à l’impôt sur le revenu. Ainsi, en imposant sur le revenu un proxénète, comme cela a été explicitement évoqué par le Senat, ne peut-on pas considérer que ces fonds, obtenu de manière illicite, et récolté par l’Etat, ne s’apparenterait-il pas du blanchiment ? En effet, constitue également un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit.

Ces différentes contradictions entre un Etat qui semble d’une part, réprimer tous les démembrements possibles de la prostitution mais également proposer des lois prenant en charge les prostitués et ce, dans le but de limiter l’accès à cette profession ; et qui s’autorise d’autre part à imposer fiscalement le métier de prostitué, ne peut être que remis en question.

C’est à se demander si, comme au Moyen Âge, elle est encore considérée de nos jours par nos politiques comme un mal nécessaire…